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Décalages
Angelus
De ce qu'on voit d'une fenêtre, si on ne connaissait les points cardinaux, on pourrait se demander quelle est cette lumière, du matin ou de la nuit proche ... de l'angelus de l'aube à l'angelus du soir ... est-ce parce que mon billet précédent parlait d'ange, ou parce qu'hier j'entendis sonner des cloches et qu'aussitôt, le sourire me venait aux lèvres, que je pensais à ça, l'angelus, l'angélus, avec ou sans accent, en latin ou en français.
Images ancrées depuis l'enfance : dans le sous-sol de ma grand-mère, sur un vieux cadre-losange au mur, un angelus, celui de Millet, sombre, porte proche ouverte sur la cave, dans le peu de clarté, où seulement un brin de lumière traverse une infime fenêtre, au bout là-bas, rehaussant d'or quelque toile d'araignée dans le levant ou le couchant ; et une seconde qui se mélange à la première, d'un corps statufié, debout, le mien, au milieu du jardin, un soir, le cœur battant fort aux premières mesures de la frappe mélodieuse des cloches, là-bas, au loin, à l'église ... sans doute est-ce depuis cette musique de l'enfance, aussi, que j'aime ce son, qui sans doute, me donne une sensation de protection, de monde qui mesure les heures à l'empan des travaux de chacun, alors plutôt dans les champs, de monde avec ses repères, son calme du soir, son ordre tranquille au fil des jours. Cela n'a rien de religieux, c'est juste, c'était juste alors, une sensation que tout est à sa place et qu'un certain chemin des choses a à voir avec la douceur et le destin, alors, de nos vies.©iels du Krop
Les villages brillent au soleil dans les plaines ... avec des sons d'angélus ... des chants de vêpres ou de noires croisées ... avec des sentiers où, quand c'est le mois d'octobre, le vent fait voler les feuilles de châtaigniers.
(Francis Jammes)
Tags : Nicole Cholewka angélus, Francis Jammes de l'angélus de l'aube à l'angélus du soir
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Commentaires
Quel beau texte !
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Samedi 6 Octobre 2018 à 08:33
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il est des sons, des images, des émois qui ont marqué notre enfance, est-ce notre insouciance d'alors qui nous donnait à croire au bien-être d'alors ou la vie plus simple des gens qui nous rendait la vie tellement plus belle ?
amitié .
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Samedi 6 Octobre 2018 à 08:39
Je le serine sans cesse ici, j'ai toujours continué d'habiter mon enfance, ou tout au moins d'avoir très présentes à l'esprit et au coeur les idées, les sensations qui m'habitaient alors, pas forcément toujours heureuses, mais infinies d'espoir, à l'époque, en l'avenir que j'attendais. Et même parfois recluse en mes rêves, je m'aperçois que c'était une vie, comment dire, forte, pleine ; j'ai seulement un peu la souffrance de ce silence, de ce manque de communication avec des parents qui ne parlaient pas, ou peu, ou pas comme j'aurais aimé. Amitiés.
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Je vois très bien le lien à l'enfance. Ces souvenirs venus de ce temps, faits d'instants de bonheur et de promesse de bonheur...
Bises tendres
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Samedi 6 Octobre 2018 à 08:43
Un peu en écho avec ce que je réponds à Marie-Claude, je peux dire que je suis toujours cette enfant d'alors ancrée dans mon présent adulte. Tu as bien dit : "promesse de bonheur" : dans mon enfance, je me suis beaucoup projetée, j'ai tellement imaginé, que tout cela existe encore en moi et me porte, me constitue. Loin d'être stérile, ça m'aide souvent à savoir "où j'en suis", sans amertume ni regrets :-) Bises tendres.
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Samedi 6 Octobre 2018 à 09:01
Je te rejoins. J'ai conscience de porter tous les âges de ma vie en moi. Tous intacts
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Samedi 6 Octobre 2018 à 09:10
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Bonsoir Nikole,
"De l'angelus de l'aube à l'angelus du soir" ... Un des premiers recueil de poésie que j'ai acheté, c'était quand ? En 70 peut être. Les pages jaunies se détachent de la reliure, elles sont décalées.
Ton souvenir m'attendrit et m'émeut et je m'en sens proche ; à moi il évoque la nostalgie d'une époque où l'on découvrait et apprenait des textes, où l'effort, l'attention, la concentration étaient des valeurs cultivées, et, de mon point de vue en tout cas, même si c'était avec une certaine autorité et parfois des couacs, qui nous enseignait la curiosité du savoir.