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Les aubes blafardes
Aujourd'hui, elle est morte. J'ai reçu un peu après sept heures un mail de Kathy : "Nikole, Sylvie est partie tôt ce matin." Elle n'aura pas tenu jusqu'à la naissance de sa petite-fille, prévue début septembre. Elle s'est accrochée, pourtant. Mais un cancer du pancréas en phase terminale, qu'est-ce que vous voulez foutre avec ça, hein ?!
Pourtant, curieusement, tant qu'il y a un tout petit bout de petit bout d'ongle de vie, on espère encore, bêtement, on se dit allez encore un jour ... encore un jour ... même si c'est loin d'être l'idéal.
Je ne suis pas allée la voir. Je n'ai pas insisté pour ça, même si elle ne sollicitait pas de visites, ou alors avec parcimonie, des plus proches, de son cercle intime. Je ne sais pas si c'est bien ou mal ; avec le covid, les visites n'étaient autorisées qu'une personne à la fois : aurais-je eu le courage de ne pas perdre mon sang-froid, de ne pas pleurer ? Je n'en suis pas sûre. Aurais-je su, ou pu communiquer, ne pas dire de mots incongrus, déplacés ? Je repense à ma collègue de travail morte d'un cancer rapide, aussi, il n'y a pas si longtemps (je ne sais plus, moi et le temps, le temps et moi, c'est une énigme). Et qu'on était alors allés voir, mais en petit groupe. Je me souviens de la profondeur abyssale de son regard, de son ombre de sourire -un frémissement si infime !- quand on a tenté de l'humour -elle qui en avait tant-, de sa main à la fois si légère et si lourde dans la mienne.
Du coup, de Sylvie, je ne me rappellerai que les rires, avant tout ; après tout. Sylvie, c'était ma prof de théâtre. Elle a quitté la scène et on est nombreux à penser à elle avec tristesse.
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Commentaires
C'est toujours difficile, le départ de quelqu'un qu'on aime, qu'on admire, à qui on tient... Partie trop tôt, sans laisser d'adresse. Et on reste là, à se faire les reproches que l'on fait aux vivants "j'aurais peut-être dû, j'aurais sans doute pu, accompagner, être là..." Mais au fond, que sait-on de ce que vit vraiment celle qui doucement lâche prise, que sait-on de cet ultime départ, du déchirement d'avec la vie, à part la certitude qu'il est irréversible, qu'il n'y aura jamais, jamais de retour en arrière? Rien, si ce n'est la solitude, dans la mort comme pour les vivants. Il y a toujours un certain désespoir à survivre, et chacun possède son propre antidote. Le souvenir en est un, puissant, même s'il n'est pas consolant immédiatement.
Ta Sylvie laisse de belles choses, le théâtre (la ferveur), une petite-fille à venir, l'avenir, c'est ce qui s'inscrit dans le passé de ceux qui ont vécu.
Je t'embrasse avec tendresse et affection ♥
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Mercredi 21 Juillet 2021 à 15:25
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Et encore une !! L'ascenceur cosmique tourne à plein......ça monte et ça descend !! Tu lui rends un bel hommage, plein de pudeur
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Mercredi 21 Juillet 2021 à 16:30
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5KathyMercredi 21 Juillet 2021 à 15:45Que dire? Je suis contente, moi, de ne pas l'avoir vue "malade", parce que Sylvie, c'était la vie, qu'elle croyait à pleines dents, c'était celle à qui il ne fallait jamais dire "pas cap", c'était "Titebonefame s'en va-t-en guerre"rien à voir avec une femme malade et diminuée....je garde des souvenirs magnifiques, des photos de la belle Sylvie, c'est mieux pour moi. On en reparlera souvent Nikole, parce qu'elle sera avec nous très longtemps encore...-
Mercredi 21 Juillet 2021 à 16:35
Tu as sans doute raison, mais je me (on se ?) pose toujours des questions dans ces cas-là, difficile de l'imaginer vieillie, diminuée, maigre et sans sourire ... gardons ses souvenirs rieurs et son allure primesautière et malicieuse. Je suppose seulement qu'il est logique de garder, amer au fond de la bouche, un goût d'inachevé, de trop tard ... Oui, bien sûr, nous parlerons de ces temps-là, avant. Merci Kathy.
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6KathyMercredi 21 Juillet 2021 à 15:467patrickMercredi 21 Juillet 2021 à 16:07Là, tu est d'un seul coup loin de la photo et tes bidouillages , loin des effets d'ombre , de flou , d'esthétisme .
Tu es face à l'indicible , l'insoutenable, et en proie à des " j'aurais p'têt' du , y aurait fallu ....." qui , même aussi durs a éprouver, peuvent quand même permettre de laisser émerger , verbaliser, cette culpabilité d'être encore en vie, quand des gens qu'on aime s'en vont. Il faudrait que nous soyons armés , blindés pour résister à ces moments si difficiles. Mais on ne l'est pas , car on est.....Only Human.
Avec toi de tout cœur.
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Mercredi 21 Juillet 2021 à 16:39
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9Sandrine from ToulouVendredi 23 Juillet 2021 à 11:52Coucou Nicole Je partage pleinement cette ambivalence des sentiments... La tristesse de ne pas lui avoir dit au-revoir mais aussi merci pour tout ce qu'elle m'a apporté. Car l'impact de Sylvie n'était pas seulement sur scène, mais bien au-delà... j'espère qu'elle avait conscience de cela, de son pouvoir de rayonnement ! Mais en même temps, je suis heureuse de garder "uniquement" comme souvenir l'image de cette Sylvie souriante, pimpante,sautillante... et je crois qu'elle ce qu'elle aurait voulu car Sylvie était résolument optimiste et joyeuse ! Un grand merci à elle et même si la tristesse de ne plus la voir prend encore le dessus et c'est bien normal car c'est le processus de deuil... prochainement les sourires et les rires remplaceront les larmes à l'évocation de notre chère Sylvie. Je t'embrasse fort-
Vendredi 23 Juillet 2021 à 13:29
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Je peux comprendre ton chagrin.... mais ne te fais pas de reproches.
C'est ne pas l'oublier que de se remémorer les meilleurs moments passés ensemble.
Bises de Mireille du sablon
Merci Mireille.
Bises.