• Les belles de jour

     

    Belles au métro dormant

     

    Heureusement qu'elle s'était assoupie, car je la trouvais tellement belle, le visage régulier, les traits fins, l'attitude sereine, que je ne pouvais détourner le regard. Plutôt que voyeuse, mot que je m'attribue volontiers mais en en riant, je me vois plutôt comme contemplative. J'aime regarder les gens et j'aime regarder les choses et les paysages : ils me fascinent parfois, ils m'attendrissent souvent, ils m'intéressent toujours.

     

    Belles au métro dormant

     

    Je trouve émouvants cet abandon, cette confiance en la présence et au regard de l'autre : dormir est normalement un repli personnel. Je sais que certain(e)s passant(e)s ici sont mal à l'aise devant ces images et je ne sais si ça doit me déranger ou non, si devant ces intimités que je force ils ont du mal avec ma perception, ou avec la leur : si c'est avec la mienne, j'en suis chagrinée un peu, parce que ça voudrait dire que je ne parviens pas à y mettre la distance et l'empathie que je souhaite montrer.

     

    Belles au métro dormant

     

    Il y a, dans chaque visage, dans chaque corps ou dans chaque posture, un détail, un élément qui retient particulièrement quelque chose en moi : dans l'image à l'écharpe rose, ce sera ce tissu joli où s'abandonne la jeune fille qui pourrait être dans un tableau. La jeune femme femme au chandail gris me semblait si fragile dans son buste que je trouvai presque enfantin ! Celle de la photo  en noir et blanc, enfin, montrait de légers plis sur son front, là où s'alourdissait sa tête dans le sommeil - j'aime bien ces petites marques ponctuelles de nos moments de vie - et, aussi,  le contraste du clair et de l'obscur était assourdissant sur elle, avec ce poignet qui, central, était à la fois lumineux et protecteur de la trop grande lumière.

     

    Belles au métro dormant

     

    Comme j'aimerais être capable de faire en poète l'éloge du sommeil et plus encore de la dormeuse, celle qui s'abandonne au sommeil dans un lit après l'amour, dans un pré après la moisson. Cet abandon tranquille viendrait-il de la certitude qu'elle ne sera jamais abandonnée ? De l'attente d'un miracle qui la comblerait ? (...) Des secrets qu'elle garde en elle ?   (Pontalis, Fenêtres)

     


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