• Entre deux fêtes, entre deux années ; passages

    Quinze seize

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Un jour suit un autre, ça change quoi, un chiffre qui diffère dans deux années qui se succèdent ? Rien ? Voire ... Sans doute l'humain, l'humaine ont-ils besoin de repères, de temps, d'actes ou de pensées, et quoi de plus symbolique que la marque d'une année qui commence comme un coup de cymbale quand une autre s'effiloche en menus sons qui vont se perdre, avec les autres, dans l'archive des nuits.

    Enfant, je me sentais toujours dans un étrange état d'esprit pendant les dernières heures de l'année. J'avais envie qu'elle ne s'arrête pas pour me préparer "mieux" à celle qui allait suivre, tout en souhaitant que la suivante arrive pour éprouver en moi un je ne sais quoi de palpitant, que j'attribuais au "renouveau". Même si cela ne durerait pas, même si le quotidien terriblement présent, statique, finirait par étouffer tout sursaut d'espoir de fantaisie sur la vie à venir.
    Je me souviens d'une année, je pouvais avoir huit ans, où, au cours de cette soirée où il ne se passait rien sinon qu'on allait, c'étaient ses débuts ou presque alors, regarder la télévision chez ma grand-mère, je me demandai ce que je pourrais faire pour que ce moment-là, de cette année-là, me marque. Alors je retournai les quelques vêtements qui se battaient en duel dans le tiroir de la chambre commune, et je sortis des collants et une jupe plissée grise, que je ne mettais normalement que le dimanche, même si une entaille la faisait un peu béer sur le côté ... n'empêche, j'étais costumée, comme si j'allais me retrouver sur une scène et que la vie allait devenir un théâtre ; lors les illusions et les espoirs étaient permis ; j'avais changé un tout petit quelque chose à la réalité. Ce peu-là me vit triomphante, même si je me demande bien de quoi ; étonnante, au sens où ma mère, se demandant ce que je cherchais là, ou voulait montrer, me regarda en fronçant les sourcils, puis en souriant ; et gagnante, puisque cette anecdote, si infime dans son apparence, est aujourd'hui intacte dans mon souvenir.
    Curieusement, je n'aime pas les habits officiels, et j'ai toujours trouvé dérangeante l'emphase des robes d'avocats, ridicule le decorum de certaines institutions. Théâtre ! me direz-vous ? Non, le palais de justice n'est pas un théâtre, c'est la vie, ce sont les vies qui s'y jouent, et l'autorité, la force, la représentation, existent pour moi par l'attitude, le verbe, la persuasion, l'intelligence.
    Quant au théâtre "spectacle", je ne le place pas sur le même plan. Et quand il y a quelques jours je me retrouvai sur une scène à dire des poèmes, cela suivit une période où j'avais été bien en mal de savoir comment, pour ça, j'allais "devoir" m'habiller. Gommer les formes, un peu, et s'habiller en noir, peut-être, pour accentuer les mains, et l'expression du visage : c'est l'idée et la tenue que j'adoptai (même si cela ne fit pas l'unanimité).

    (Vous voulez avoir une petite idée ? C'est ici.)

    Quant au vêtement, en général, j'ai toujours pensé qu'il servait deux façons de vivre, avec toutes sortes Quinze seizede gradations, d'exceptions et d'accommodements : la décoration, ou la seconde peau. Et moi, quand je l'ai pu, j'ai toujours privilégié le confort ...
    Comment me suis-je retrouvée à parler de ça, peu importe ... petites réflexions en catimini, pas si anodines que ça, mots sur l'être et le paraître, bla-bla-bla. À croire qu'à chaque nouvelle canette de fil que dévide le temps, notre in et notre out se retrouvent confrontés à quelque question existentielle sur ce qu'on est, et sur ce qu'on veut montrer de soi, en trompe-l'œil, ou dans la réalité, au moins vécue comme telle ...

     

     

     

     

     

     

    Une musique qui me va avec : Bruno Coulais
    & The Children Choir of Nice, Coraline (film)

    Les photos : © le Krop : affiche lacérée dans
    le métro pour la seconde, capture télé pour la
    première.

     


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