Une fois devant la page de l'écran, que de plus en plus souvent, je n'écris que le dernier jour de la semaine, que vais-je en dire ? quels éclats de verre vont refléter une lumière qui m'est propre, qui aura envie de jeter un œil sur ces brisures-là qui ne sont que de moi, et loin de la vie des autres, de plus en plus souvent, dans ce que j'exprime ? Quels journaux intimes ont intérêt à être lus par des gens extimes, leur parlent ? Je ne sais pas.

    Reliefs, comme je le dis souvent. Reliefs de repas de la tête, ou réels ; de pensées nocturnes : d'images passantes, dans la rue, sans le noir, dans la cuisine, la chambre ou le couloir ; reliefs déposés là comme les restes qu'on voudrait festifs des plats de la veille (meilleurs réchauffés ?) ; reliefs d'impression aux visages croisés, aux pas traînés, aux sourires devinés. Reliefs, oui, de lumières, sur les verres cassés.

    Un des bâtiments près de chez moi, ancien restau-façon-guinguette a longtemps été à l'abandon, puis racheté par je ne sais qui, abandonné à son tour. Récemment, c'est un cabinet (dit-on cabinet ?) de commissaires-priseurs qui s'y est installé. Qui sont d'ailleurs affiliés (dit-on affiliés ?) au célèbre Drouot parisien. Des œuvres, dont j'apprendrai qu'elles sont destinées à une (hypothétique ?) future vente aux enchères, trônent dans la vitrine ; je suis d'ailleurs tombée amoureuse d'une d'entre elles, celle-ci :

   Et il se trouve que cette semaine a eu lieu, justement, céans, une vente aux enchères, à laquelle nous avons assisté (très longtemps en fait) par curiosité de découverte d'un monde inconnu de nous. La veille, nous avions pu regarder les objets destinés à la vente du lendemain, et j'avais remarqué des boucles d'oreilles qui m'avaient tapé dans l'œil à défaut de finir sur mes oreilles. Pour un prix estimatif de départ pas plus élevé que celui de boucles fantaisie : ce en quoi je m'étais lourdement fourvoyée, confondant le numéro avec celui d'un poudrier ; en réalité, les super boucles étaient estimées au départ autour de 300 et finiront à 500 ... adieu mes rêves de richesse.

    En vrai, c'est quand même le triomphe de la futilité et de l'étonnement. Sont enchérées des choses que je mettrais spontanément à la poubelle (même moi qui jette si peu !), parfois même les enchères baissent ! (pas forcément, je pense qu'il y a des prix dits de réserve, des seuils décidés par celui qui vend -?-), alors que d'autres, certes jolis, atteignent des prix inimaginables, et très vite. L'argent et l'or, ça marche toujours. J'étais étonnée de voir des vêtements ! C'est parce que ce sont des marques, Hermès par exemple (qu'est-ce qu'on en a  à foutre, franchement d'un carré Hermès, et en plus, taché !!!) ! Beaucoup de mochetés ou de choses parfaitement superflues, même si le concept est purement subjectif en fonction de ce qu'on possède et ce qu'on est (Le superflu, chose très nécessaire, disait Voltaire : je me rappelle avoir eu ce sujet de dissertation en seconde, et j'aimerais bien retrouver la copie pour lire ce que j'ai bien pu raconter là-dessus !) Bref, étonnée je fus, étonnés nous fûmes, mais intéressés par cette expérience nouvelle que nous ne prévoyions pas de vivre un jour.