• Prémices

     

    Se faire des films

     

     

     

    Au milieu du monde. Exactement. Au centre du silence, voilà où il était. Cette phrase d'ailleurs, le milieu du monde, lui évoquait un titre de film dont il ne se rappelait pas un traitre mot, mais une image -une seule- celle d'un visage de femme aux cheveux longs, debout sur une terre continentale déserte, et dont la mimique dans son souvenir, était celle d'une triste perplexité.

    Il était parti sans prévenir, et avec le bagage minimum, un bagage semainier en quelque sorte : sept sous-vêtements, sept polos, deux jeans, brosse à dents-pâte dentifrice, savon, mais pas de rasoir -il se laisserait exceptionnellement pousser la barbe-, quatre grands cahiers à grands carreaux, un paquet de stylos fluides.

    Ça l'avait saisi d'un coup, et il comprit ce qui se passait dans la tête de ceux qui faisaient comme lui. Fuir là-bas fuir. Là-bas ? Pas besoin. L'ailleurs, c'est bien connu, commence au coin de la rue. Non, il suffisait de s'éloigner à peine, de gagner une ville proche,  de moyenne importance, et d'y déposer pour un temps son abandon de la vie trépidante, tropidante, trop speedante. D'être -enfin !- seul avec soi, en égoïste qu'il n'osait pas être dans la proximité obligée des êtres et des jours ... mais comme le solitaire qu'il était au fond de lui.

    La chambre de l'hôtel était propice à ce qu'il cherchait, propre, claire, mais donnant sur la cour : gage de silence ; petite -presque monacale-, isolée : promesse de concentration ; conditions idéales. Les prétextes d'immobilité étaient tombés les uns après les autres. Il n'avait plus qu'une chose à faire : l'écrire, ce foutu roman !

     

     

    Photo et texte : Le Krop


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