• C  comme  c a u c h e m a r (S)

     

    AVEC LE COEUR

    Entre vendredi et samedi, les longs moments que je vis en songe, et que je crois si fort une réalité, sont lourds, épais, violents. Plein de gens dans un vaste endroit qui ressemble à un cloître. Images en nombre, effacées déjà, et c'est peut-être mieux ainsi. Foule éparse, vaste rectangle de terre, profond à donner le vertige, où l'on jette de petits jouets blancs comme autant de souvenirs de ceux qui ne sont plus.

    Et ce tir de mitraillette au loin, sur nous, sur moi, de la mafia. Terreur de l'instant. Réflexion à mille à l'heure où l'on se dit que, peut-être, on va mourir, là, tout de suite.                

    L'instant qui suit, celui du grand silence, de l'affolement où l'on regarde, autour de soi. Je suis vivante et même pas blessée, mais près de moi gît sur le côté, un corps frêle et tout chiffonné, celui de ma mère. La scène, dans mon rêve, s'arrête là, et c'est tant mieux.
    Oh, ces instants de trouble, après.

    Et puis pour penser à tout ça avec sérénité, je bois mon café et j'ouvre la télé. Mais je ne peux pas être sereine : un jeune homme, dans le Connecticut, a tué sa mère, et, ensuite, est allé descendre vingt gosses dans une école élémentaire. Alors je compatis, de tout coeur, avec ces pauvres parents qui eux aussi rêveraient que ce qui s'est passé dans leur vie ne soit qu'une chimère qui disparaisse avec le jour qui lève.

     AVEC LE COEUR

      


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