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Ne pas broyer du noir
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Comment, où, ai-je pu être confrontée dans ma vie à l'oeuvre noire, l'oeuvre au noir de Soulages, je n'en ai plus la moindre idée. Si le bleu Klein me plaît comme une espèce de symbole de force étrange et obsessionnelle, je n'ai en revanche au grand jamais succombé à une hypothétique pureté monolithique du blanc (comme celle qui fut stigmatisée par des lèvres rouges !). Devant ce monochrome-là, j'ai toujours reculé comme devant une fumisterie. Les noirs de Soulages m'ont au contraire toujours happée. Peut-être justement à cause de cet article : les, et non le ; à cause, sans doute, de la profondeur immédiate que j'y ai perçue, à cause de cette sensation obscure de miroirs qu'on traverse chaque fois, selon notre regard et l'orientation de sa lumière. Plus, encore, jamais je n'aurais imaginé les sensations éprouvées dans un lieu consacré, comme sacré, le musée du peintre, à Rodez, sa ville de naissance, un lieu habité, à la dimension quasi magique, divine. J'y ai par ailleurs découvert que j'aimais sinon plus, au moins autant, les oeuvres antérieures à l'immersion dans l' outrenoir : les eaux-fortes, lithographies et autres sérigraphies, puissantes, si présentes à l'oeil et au ressenti.
Il y avait entre eux l'intimité d'un secret bien gardé (M. Yourcenar, L'œuvre au noir)
Un musée immense, aux bonnes ondes inouïes, où je passai, où nous passâmes des heures que je n'oublierai pas. Un silence et un recueillement d'église calme et tranquille : quiétude, admiration et recueillement ... si étrange de lire ces mots-là, sous la plume d'une athée ... il est peut-être des lieux neutres où le païen transfiguré existe aussi fort que la religiosité bien vécue. Ils ont foutrement raison, ceux qui disent que l'Art réconcilie avec la vie. Que l'âme des choses n'est pas inanimée.
D'ailleurs, les découvertes de cet été-là furent tellement belles, entre Arles et ses Rencontres photographiques, les verdures chatoyantes de l'Aveyron sous le soleil, Rodez et son musée Soulages, et Conques, que je rêvais depuis si longtemps de voir en vrai, et non plus sur un écran télé.L'abbatiale : un contraste étonnant, même si on ne qualifie pas en général de contrastés ou de décalés ces vitraux-là en regard de ces pierres ... une idée audacieuse, transportée.
Oui, l'Art nous aide à vivre, même quand il nous dépasse, nous transcendant.Elle est retrouvée. Quoi ? L'éternité. [...] allée avec le soleil ... (Rimbaud)
© L'Oeil du Krop
Tags : Soulages, Conques
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Commentaires
pourquoi donc un athée ne pourrait pas ressentir la magie des sensations ? je les jouis avec tellement de profondeur que mon souffle de vie envahit le néant créateur de rêves autant que de réalités ...
c'est beau ces nuances de noirs et de blancs
amitié .
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Dimanche 19 Janvier 2020 à 09:14
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4patrickLundi 13 Janvier 2020 à 16:22Se laisser happer par une toile de Pierre Soulages, c'est comme entrer dans la nuit, noire comme l'eau d'un puits, et traversée de lumières. Affronter ces traits, ces griffures, ces éraflures dans ces noirs qui sont autant de reflets de ce que nous sommes, de ce que nous traversons d'une vie... Les noirs de Soulages, c'est la profondeur vertigineuse de l'âme, et quand on n'a pas peur d'y plonger, de s'en pénétrer, on y trouve le soleil...
Tes mots à toi, tes citations choisies, tes photos, tout dit ton émotion, et la sérénité, la paix...
Je vais rêver de Conques, et de Rodez ♥♥♥
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La BaladineLundi 13 Janvier 2020 à 21:40Et cette beauté blonde en robe rouge et gilet blanc comme une pontuation lumineuse en plein milieu de la série. .. et ces deux appuyés l'un contre l'autre... et ces autres...amour, curiosité, amour encore et réflexion et profondeur...❤
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Dimanche 19 Janvier 2020 à 09:17
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Dimanche 19 Janvier 2020 à 09:18
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Ah!, enfin ton "reportage" sur le musée Soulages !
J'aime bien ta vision du noir lumière et les découvertes faites !Mercredi (et jusqu'à dimanche), coïncidence je le jure, il y aura sur mon blog un article sur Conques, un parallèle à tes photos de ce jour.
Bonne semaine.
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Dimanche 19 Janvier 2020 à 09:19
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Tu es si persuasive, si passionnée, si experte, que, pour un peu, je me serais fait avoir. Mais, il n'y a rien à faire, je n'arrive pas à "accrocher" quand il s'agit d'un tableau unicolore. Je ne suis jamais ému dans ce cas. Mais, je veux bien admettre qu'il y a chez moi comme une obstination à ne pas comprendre. Sorry. Florentin
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Dimanche 19 Janvier 2020 à 09:23
Persuasive ? Ah bon (tant mieux) :-) ; passionnée (... certes) ; experte ... pas du tout, seulement des ressentis. Et est-il besoin de comprendre pour aimer ... par exemple je suis très sensible à certaines poésies auxquelles j'entrave que'tchi ! Pas grave. Le plaisir et l'émotion .... pour le rester, on ne va pas se forcer ! :-) Merci d'avoir donné ton avis, d'être passé. Bon dimanche !
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J'ai eu le même parcours que toi, à Conques et au musée Soulages et j'ai adoré, jusqu'aux larmes.Comme toi, j' ai passé des heures chargées d'émotion dans ces deux lieux.
Qui plus est, cette fois-là, l'exposition temporaire du musée Soulages , consacrée à Calder était un bonheur supplémentaire.
Mon rêve, y revenir!
Bonne et heureuse année.
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Dimanche 19 Janvier 2020 à 09:26
Calder en plus ! Mes yeux eussent été en surcharge ! :-) (souvenir extraordinaire d'une expo de Calder à Beaubourg il y a maintenant un nombre certains d'années !) Retournes-y :-) ! Il ne faut pas se priver de ces bonheurs-là. Grand merci pour le passage ici, bonne et heureuse année itou et bon dimanche !
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Enchantée d'entrer un peu dans ce musée grâce à toi et en prime des photos de Conques, merci pour ce beau billet, Nikole. Je viens justement de lire "La nuit du coeur" de Christian Bobin qui écrit si bien sur cette abbatiale.
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Dimanche 19 Janvier 2020 à 11:24
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C'est navrant, mais Soulages me sort par les trous de pif : tout ce noir sur des grands formats, en rectangles ou en carrés les uns à coups de pinceau horizontaux ou verticaux... Pas de quoi en pondre une pendule. Pur moi, ça n'a pas de sens et ce n'est pas de la peinture. mais c'est vrai que je préfère un Guardi ou d'autres peintres qui ne sont plus de notre temps.
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Mardi 21 Janvier 2020 à 11:35
Comme je disais, les goûts et les couleurs hein ! Dans le genre grands coups de pinceaux noirs, j'aime aussi beaucoup Hans Hartung, certes moins massif ! Cela dit, je ne m'explique pas ces élans, moi qui critique souvent des "choses" contemporaines ; c'est comme ça, c'est tout : j'y trouve des choses peut-être personnelles.
Merci pour ton commentaire, qui m'aura, en plus du plaisir de te lire, fait découvrir Guardi, dont j'apprécie le souffle puissant dans ses paysages.
Bonne journée.
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La vérité, c'est que Soulages, ce n'est pas que du noir... c'est du Bleu, du Brou de noix, du blanc, du creux et des épaisseurs qui ouvrent des espaces intersidéraux, des sillons... bref, tout un Univers... Une oeuvre de Soulages n'est pas abstraite, tout comme le Bleu Klein qui est palpable, velouté... une toile de Soulages est... tangible, concrète, matérielle... tellement, que même mon mari qui était non-voyant (à cette période-là) à cette visite de musée (où il n'y avait qu'une toile de Soulages), même lui l'a VUE quand je lui ai décrite... On peut voir Soulage, même sans les yeux !
http://maia-blog.eklablog.com/mon-noir-et-mon-bleu-a126573124
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Mardi 21 Janvier 2020 à 15:59
Mais oui, il y a un monde à travers et derrière tout cela ; merci de parler aussi bien de mes sensations ... Des autres couleurs, de la matière, de la profondeur, de la lumière immiscée sans cesse, des niveaux différents de la préhension. Ton "anecdote" est troublante.
Et j'invite mes lecteurs à passer chez toi.
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Merci Nikole, et je suis passée chez Big Bear... ses photos de Conques sont au-delà de ce que je pouvais imaginer, et j'ai beaucoup de regrets de ne pouvoir encore y aller bientôt...
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Mercredi 22 Janvier 2020 à 11:58
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Je t'avoue que je reste perplexe devant de telles toiles...J'ai pu en voir exposées au centre Pompidou de Metz et rien, le néant...heureusement que tu nous proposes une super balade dans cette belle ville.
Bonne journée!
Bises de Mireille du sablon
Les goûts et les couleurs, hein ! Je ne m'explique pas moi-même l'engouement que j'ai pour cette oeuvre-là, alors ! :-) Merci de ton passage Mireille et bon dimanche.