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éKlats 25/52 deux
Sortie de Croix-de-Chavaux, à Montreuil, je me suis demandé un instant dans quel pays j'étais.
La bouche de métro ouvre sur une place où était déployé un marché de fringues et objets à même le sol, proposé par des femmes en boubou. J'ai détourné le regard parce que j'étais surprise et mal à l'aise. Je me suis éloignée au milieu de cafés où des hommes attablés, seulement des hommes, parlaient arabe. Le trottoir était jonché de mégots et de saletés diverses. Je me suis sentie mal. Non qu'il y eût une quelconque agressivité dans l'air, non, c'était plutôt bon enfant, sauf que j'étais dans un autre pays, et pas une seconde dans le mien.Hormis l'Atlantique et ses bienfaits pérennes sur mon corps et mon esprit, le fait que je me sente bien sur mon île presque, c'est que c'est une forteresse douce encore préservée, où je ne me sens pas en minorité, et où chacun(e) est à égalité de représentation : je n'y ai jamais vu de voile ni de kippa et c'est ainsi que je comprends la laïcité : la religion doit rester chez soi. Ou dans les lieux prévus à sa manifestation. Mais ne jamais être prosélyte, dominante, et encore moins assassine : incroyable qu'il faille le préciser.
Sur le quai de la ligne 9, une fille lisait, et j'ai souri. Entrée dans le métro, je me suis retrouvée en face d'elle. Jeune, jolie, calme, elle a regardé avec une sorte de sérénité triste la femme qui vociférait à l'autre bout de la rame et a replongé dans son livre. Nous étions debout et un mouvement soudain l'a fait chavirer. Je l'ai retenue un peu brusquement par le bras.
J'ai dit : "Ce serait dommage d'abîmer une des dernières lectrices de ce monde. Qui en plus lit Marc-Aurèle !"
Elle a ri, et répondu : "Et en plus, je vais à un concert de harpe !" J'ai ri à mon tour et conclu tout haut : "Vous me réconciliez avec le monde !"Une heure de métro pour aller voir jouer deux anciennes copines de théâtre. Quel allait être mon était d'esprit devant cette pièce dont j'aurais pu faire partie si j'avais voulu ? Le théâtre, ses contraintes de temps et de texte, ne me manque pas (même si je serais ravie de reprendre Les Femmes savantes, ce qui se fera peut-être et dont je me réjouis !) mais j'avoue qu'en attendant le début du jeu proposé ce soir-là, je ne parvenais pas à analyser mon état d'esprit : étais-je envieuse, admirative, détachée, libre ?
La pièce, difficile car constituée de nombreuses allées-venues en scénettes avec beaucoup d'interprètes, a duré deux heures sans que je m'ennuie, en admirant le boulot fourni et la prestation de la plupart, mais en voyant, maintenant, de façon acérée, les défauts : embrouillaminis divers, approximations, paroles les unes sur les autres, décalages, bredouillages, légers trous, perceptibles, même si on les rattrape toujours, d'une façon ou d'une autre. J'étais passée de l'autre côté, à la fois bienveillante et critique, ce qui n'est peut-être pas incompatible.
Ce qui est gratifiant, autant pour qui applaudit que pour qui est applaudi, c'est cette joie presque palpable ...
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Commentaires
Il m'est aussi arrivée de me sentir dans un autre pays surtout dans certains quartiers de Paris et même ici chez moi en province...mais...faut-il pour autant en déduire " chacun dans son pays"? Nous avons accueilli tant de monde,volontairement ou pas, peut-être faudrait-il tout régulariser de manière humaine et non de façon "excessive"... dans un respect mutuel?
Bon dimanche!
Bises de Mireille du sablon
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Lundi 24 Juin à 00:06
"Chacun dans son pays" ne veut plus rien dira aujourd'hui mais quand tu es dans un pays qui n'est pas dans ta culture, tu te plies à ses lois sans la ramener. Ce sont précisément les excès qui ... m'excèdent !!
Comment veux-tu respecter quelqu'un qui ne respecte pas ton pays ? (Et je ne généralise bien sûr pas)
Bonne nuit.
Bises.
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Oui, c'est vrai, les territoires perdus de la république ça existe... Dans le meilleur des cas, quand il n'y a pas de dealers, ça peut aller, ils ne mordent pas... Si tu ne croises pas un extrémiste avec couteau...
Quelqu'un lisant de la littérature classique... C'est vrai qu'on a envie de l'embrasser...
Le théâtre... Je ne parviendrais même pas à retenir une seule réplique...
Très bonne journée dominicale
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Lundi 24 Juin à 00:07
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Lundi 24 Juin à 10:56
On n'entretient plus un bâtiment effondré...
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Lundi 24 Juin à 10:59
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Bonjour, Nikole. Nos villes d'Europe sont depuis longtemps ouvertes à la diversité des cultures. C'est souvent pour des raisons économiques que beaucoup se regroupent dans certains quartiers, c'est vrai des riches comme des pauvres. J'ai la chance d'habiter un quartier "mixte" où la cohabitation se passe bien en général.
"Bienveillante et critique" à la fois au théâtre, bravo. Je n'y suis plus allée depuis trop longtemps.
Bon dimanche !-
Lundi 24 Juin à 00:09
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Il y a quelques années, traversée du 93, par réflexe m'assurer du verrouillage des portes de la voiture, me suis cru à Dakar 40 ans plus tôt, la convivialité en moins ... Terribles ces parcages territoriaux et communautaires voulus par tous ! On est pas sortis du sable !
Sympa à toi d'aller voir les vieilles copines jouer, sans regrets de ne plus en être, s'ôter cette pression annuelle, passer à autre chose ...
Bonnes activités.
Bonne semaine.
Bises.-
Mardi 25 Juin à 08:52
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Je devais avoir dans les 20 ans, et j' avais décidé de descendre sur Paris, à Pierrefitte, où résidait la soeur de mon épouse !
Pas de GPS, même pas de carte, et à l' époque, déjà j' avais été sidéré de ne trouver pour m'indiquer le chemin, que des africains, du Maghreb, ou d' Afrique noire !
Aujourd'hui, pas besoin d' aller si loin, il suffit de sortir, ils sont partout, surtout dans les commerces, et les marchés bien sur !
Ils font peur le vendredi, quand ils sortent de la mosquée, et je me demande ce que l' imam leur a tenu comme discours, pour qu'ils soient aussi énervés !
Je n' ai pas plus fréquenté les théâtres que les salles obscures, mais du temps où la télé ne proposait que 3 chaines en noir et blanc, on regardait toujours les pièces proposées !
Bon dimanche
Amitié
C'est le déséquilibre des forces qui est insupportable. Quand on se sent en minorité, il est normal de ne pas se sentir bien.
Pas de mosquée à proximité, mais ils (le gouvernement) ne fait pas grand-chose contre les imams mortifères !
Sauf exception, je ne fréquente plus ni les cinémas ni les théâtres.
Bonne nuit.
Amitié.